J'ai croisé il y a peu le titre du roman de Nicolas Clément sur un blog amical.
L'éloge, bien évidemment, m'a intriguée...
Libres pensées...
Sauf les fleurs est un minuscule roman, qui prend le parti de la poésie pour aborder un sujet grave. D'une grande puissance évocatrice, il y est question de Marthe, de son jeune frère Léonce, de la ferme dans laquelle ils ont grandi, et sont devenus les témoins de la violence de leur père.
Au cœur d'une nature rassérénante, abreuvés de la tendresse maternelle, Marthe et Léonce apprennent à ne compter que l'un sur l'autre, à faire tout leur possible pour protéger leur mère, sur lequel frappe le père sans raison et sans vergogne, quoi qu'en disent les villageois qui savent tous le calvaire enduré par Andrée (la mère, donc).
Je ne voudrais pas trop vous en dire sur la trame, qui mêle des émotions variées, et parvient pour autant à ne pas verser dans le misérabilisme (et fait donc mieux, en la matière, que L'instant précis où les destins s'entremêlent).
Il est rare de lire un récit relevant la gageure de traiter le sujet de la maltraitance et de la violence conjugale de manière pudique. Le choix d'adopter le regard de l'enfant, de Marthe qui est une toute jeune fille, est pour cela très judicieux. Une certaine innocence se marie au désenchantement, à ce que l'on pourrait prendre pour de la résignation, et qui se confond en réalité avec la colère qui couve.
La langue, en outre, est maniée avec une dextérité saisissante, les expressions s'inventent au fur et à mesure, les mots se transposent, se découvrent, font naître un sens nouveau et inespéré, alors que l'on croyait en littérature être condamné à relire toujours les mêmes phrases galvaudées.
Une lecture brève et cependant puissante, qu'il serait regrettable de manquer...
Pour vous si...
- Vous êtes sensible aux récits tissés de poésie...
- ...Et ne vous voilez pas les yeux devant les horreurs que peut receler la vie quotidienne.
Morceaux choisis
"Notre ferme n'est pas grande, mais c'est notre ferme."
"Car je voudrais que Maman soit belle sans attendre mes mains, que tous voient ce que je vois, la source de mon or, l'épine qui me guide, son beau visage de travailleuse."
"Je suis d'une fièvre qui perce et dure, jamais ne se repose, ni de cerisaie ni de mains autour. Au cimetière, j'ai des larmes assises sur leur jour d'aimer : Maman est partie. Dans notre ferme, il n'y avait pas beaucoup d'air, nous manquions de terre profonde, mais nous avions des racines qui courraient sans déranger les pierres. Le cercueil de Maman s'enfonce lentement. Il me semble, à cet instant, que la paille a tout dit."
Note finale
4/5
(très bon)
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