Ma reine est l'un des premiers romans inclus dans la sélection d'automne des 68 premières fois. Son auteur, Jean-Baptiste Andrea, est réalisateur et scénariste, et désormais, également écrivain.
Libres pensées...
Ce roman n'est pas le premier de la sélection dédié à l'enfance : Neverland constituait également un texte poétique et sensible. Ma reine s'en écarte néanmoins, dans la mesure où Neverland comptait des scènes d'enfance tissées les unes aux autres, sans intrigue véritable.
Ma reine repose sur une intrigue : un enfant décide de partir faire la guerre pour montrer à ses parents, qui tiennent une station-service et veulent l'envoyer dans un institut, qu'il n'est plus un enfant. Il se cache sur le plateau derrière chez lui, et fait la rencontre de Viviane, qui devient la reine, et le nomme Shell. Il promet de ne pas chercher à savoir d'où elle vient, où elle vit, pour ne pas provoquer la perte de ses pouvoirs, mais pour Shell, elle est reine, elle existe. D'ailleurs, lorsqu'elle disparaît, il fait tout pour la retrouver.
Comme tous les enfants, Shell n'est pas un enfant comme les autres. Mais sa vision des choses et du monde qui l'entoure est certainement plus particulière encore que celle de beaucoup d'enfants. Sa tournure d'esprit, son prisme de perception nous interpellent, les images qu'il exprime font sourire, laissent un drôle de goût, comme si un monde lointain cherchait soudain à nous rappeler à lui.
J'ai été happée par l'intensité de ces images, et des émotions qui habitent Shell, que j'assimile à l'enfance. Ce dont on s'est lassé adulte, parce que l'on a eu l'occasion de le vivre à de nombreuses reprises, présente une puissance inouïe lorsque l'on est enfant, la première fois que cela se présente à nous. C'est en cela que, n'ayant jamais fumé moi-même, j'ai pu cependant partager le ressenti de Shell fumant sa première cigarette, celle qui occasionne le feu qui lui vaudra de voir ses parents sur le point de le placer en institut.
L'imaginaire de l'enfant étant prégnant, il va sans dire que l'on a l'occasion de s'interroger longuement sur l'existence "réelle" de ce qu'il nous rapporte, à commencer par Viviane. Et puis, peu à peu, cette obsession tout adulte s'étiole, se desserre, se dissout. Bientôt, peu nous chaut de savoir ce qui est réel de ce qui ne l'est pas, car dans les yeux de Shell, il ne fait pas un pli que tout est vrai, et c'est bien là l'essentiel.
Ma reine est un roman qui fait écho à l'intime, étrangement, avec lequel je suis entrée en résonance, qui m'a émue pour cela.
Pour vous si...
- Vous êtes prêt à laisser derrière vous, l'espace d'une lecture, vos réflexes d'adulte.
Morceaux choisis
"J'avais un plan. A la guerre, je me battrais, on me donnerait des médailles, je reviendrais et là, tout le monde serait bien forcé d'admettre que j'étais un adulte, ou tout comme."
"Le 26 août, j'ai dit à Matti que c'était mon anniversaire, je lui ai montré le jour sur son calendrier, il m'a juste tapé dans le dos et voilà. Le soir dans ma tête je me suis offert plein de cadeaux, un nouveau GI Joe pour commencer une armée avec celui que j'avais déjà, un train électrique, puis j'ai allumé assez de bougies pour chasser la nuit du plateau entier. J'avais mille ans, j'étais vieux comme les pierres et les petites flammes brillaient partout, il n'y avait pas assez de place dans l'univers pour les faire tenir. Je les ai toutes soufflées et la nuit est revenue."
"Ca me rassurait de savoir que c'était ma faute, parce que tout avait toujours été ma faute, que j'y étais habitué et que c'était aussi confortable que mon vieux pyjama de velours vert."
Note finale
4/5
(cool)
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