Il y a de cela quelques années, Moi et toi, de Niccolo Ammaniti, m'avait profondément envoûtée.
Son dernier roman, Anna, m'était à la fois intriguant et suspicieux, dans la mesure où il se présentait comme une dystopie, genre éloigné de ce qui m'avait plu dans son autre ouvrage. Mais une fois n'est pas coutume, il a fallu, telle Saint-Thomas, que je me fasse une idée par moi-même (profitez-en, je ne cite pas un apôtre tous les quatre matins).
Libres pensées
En 2020, une épidémie a frappé tous les adultes, la Rouge, et les a décimés. Les enfants sont demeurés insensibles, mais dès que l'un d'eux devient adulte à son tour, il est irrémédiablement infecté.
Dans un monde délabré, les enfants tâchent de survivre, à l'aide des quelques consignes laissées par les derniers adultes.
Parmi eux, Anna et son frère Astor, qui ont vu leurs deux parents mourir.
Sujet très en vogue et traité de nombreuses façons! Je pense bien sûr, très récemment, à Dans la forêt, à Station Eleven et bien d'autres. Il s'agira, pour certains, d'un point fort indéniable, et pour d'autres, dont je fais partie, davantage d'un point faible, car il faut alors de l'originalité et du panache pour se démarquer, et ainsi proposer aux lecteurs un récit enrichissant, ou, à défaut, intéressant.
Le roman de Niccolo Ammaniti se situe, à mon goût, entre les deux. Comme dans Moi et toi, l'auteur a un certain talent pour dépeindre des personnages qui émeuvent les lecteurs, semblent à la fois proches et singuliers, presque marginaux. Anna est une petite fille qui a grandi par la force des choses, et ne se laisse désarçonner par aucun des obstacles qu'elle rencontre. Son petit frère Astor vit dans son ombre, voudrait se révolter, tâche de le faire parfois, à la manière d'un enfant toujours, mais demeure attaché à sa soeur. Pietro, enfin, complète le trio en apportant à la fois un équilibre et un trouble, à l'instar du chien qui attaque Anna dans la toute première scène du livre.
Le lecteur est ainsi aspiré dans les faits et gestes de ces gamins abandonnés, livrés à eux-mêmes, et si ce quotidien n'a rien de très nouveau, tant il ressemble à ce que d'autres romans ont raconté sur ce thème, la description des relations suffit à créer l'intérêt et à le maintenir tout au long du récit.
Les développements ainsi que la chute sont relativement attendus, mais cela n'a guère d'importance, dans la mesure où l'ambition que se fixe l'auteur n'est pas tant dans une quelconque révélation ou dans un sens soudain dévoilé, que dans la peinture du surgissement d'un nouvel ordre suite à la disparition de la civilisation actuelle. Peinture imparfaite, dans la mesure où le romanesque l'emporte sur le philosophique, et où la réflexion que cela pourrait faire naître n'est finalement qu'anecdotique, et n'a pas d'autre prétention.
Anna forme donc un roman dans lequel on retrouve des qualités analogues à celles de Moi et toi une facilité à aborder les relations entre les êtres, néanmoins son cadre ne présente pas d'apport ni d'intérêt substantiel à mon sens.
Pour vous si...
- Vous êtes un fin lecteur de dystopies en tous genres.
- La prose d'Ammaniti vous enchante, quel qu'en soit l'objet.
Morceaux choisis
"A la fin, ce qui compte c'est pas combien de temps dure la vie, mais comment tu la vis. Si tu la vis bien, à fond, une vie courte vaut autant qu'une vie longue. Tu crois pas?"
"Le mode d'emploi disait de se relaxer et de ne pas être tendue quand on insérait le tampon la première fois.
Elle s'assit sur l'avant de la voiture et s'en enfila un, surprise que ce soit si facile et peu douloureux." (Hum, cher Niccolo, laisse-moi avoir de GROS doutes sur la crédibilité de cette scène. M'est avis que tes sources ont quelque peu enjolivé la réalité)
"Pietro avait explosé dans sa poitrine et des milliers de fragments acérés couraient dans ses veines, lui déchirant la chair.
Maintenant elle comprenait ce qu'était l'amour, cette chose dont on parlait tant dans les livres de sa maman.
L'amour on sait ce que c'est seulement quand on nous le prend.
L'amour c'est le manque.
Note finale
2/5
(pas mal)
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