mercredi 28 octobre 2015

Ah! Ça ira..., Denis Lachaud

Après quelques lectures réjouissantes (la deuxième guerre mondiale vue par Martin Amis puis Elena Costa, les moeurs improbables en Libye et Syrie rapportées par Riad Sattouf), je me suis dirigée vers un contexte actuel et même futuriste, avec le roman de Denis Lachaud, Ah! Ca ira...
Et bien, qu'on se le dise, ce n'était pas moins gratiné.



Le synopsis

Dans les années 2010, Antoine entreprend une action politique d'envergure au nom d'un groupuscule jusqu'alors inconnu, Ventôse. Rebaptisé Saint-Just, et en compagnie de confrères renommés Robespierre ou encore Marat, il participe à l'enlèvement du président de la République française.
Cette initiative tourne peu à peu au fiasco, et le symbole fort qu'ils ambitionnaient ne trouve aucun écho dans la population, qui condamne bientôt leurs actes.
Des années plus tard, la France s'est enfoncée dans un certain marasme, les inégalités se sont creusées, et Antoine réintègre une société plus capitaliste que jamais. Il se rapproche de sa fille Rosa, qu'il n'a guère vue grandir, et qui, à sa manière, porte en elle une révolte qu'il connait bien.

Mon avis

La majeure partie du roman porte sur une période à venir, et constitue en ce sens un récit d'anticipation. L'auteur prend le parti d'explorer les conditions de la révolte, le soulèvement du peuple et met en parallèle l'action menée par Antoine, et celle menée par Rosa vingt ans plus tard. En tout cas, le lecteur ne peut s'empêcher de faire ce parallèle par lui-même. La réponse apportée par l'auteur est assez pessimiste dans les deux cas, mais a le mérite d'intégrer des critères explicatifs de l'échec : dans le cas de l'enlèvement du président, l'action semble en effet hasardeuse, et l'issue précipitée, engendrant des erreurs tactiques qui empêchent Ventôse d'accéder à l'impact souhaité, en retournant notamment l'opinion publique (cette chère opinion qui souffle le chaud et le froid en toutes circonstances).
L'idée qui sous-tend le roman m'a donc intéressée, mais par moment, l'intrigue m'a paru se relâcher un peu, et les personnages manquaient aussi, à mon sens, de consistance.
Une lecture qui ne me laissera donc pas un souvenir impérissable, mais qui n'est pas inintéressant dans les pistes avancées pour faire entendre la voix des masses et réformer un appareil politique vérolé.


Pour vous si...
  • Vous êtes du genre à "condamner le système"
  • Vous pensez qu'il faut faire quelque chose contre ce fameux système
  • Oui, mais vous ne savez pas trop comment il faudrait s'y prendre. Ce roman vous propose une ou deux pistes foireuses, que vous pouvez d'ores et déjà écarter si vous ne tenez pas à ce que vos idées soient mal interprétées. C'est un coup à finir incarcéré pour un moment, et je vous renvoie vers La petite barbare pour vous rappeler en quoi ce n'est pas souhaitable.
Morceaux choisis

"On ne sait pas qui est l'autre.
On ne sait rien du monde qu'il construit et dans lequel il vit."

"Le monde tel qu'il se présente à moi va se déchirer comme une toile et je vais découvrir que la réalité, c'est la cellule." (mon amour pour Excel est en quelque sorte né de cette façon)

"Si tu t'investis dans une action aussi radicale que la nôtre et que tu peux, après qu'elle a échoué, constater qu'elle n'a absolument rien produit, tu n'as plus qu'à te flinguer ou à chercher ce qui a bien pu motiver ton implication dans sa mise en oeuvre. Alors tu te demandes si l'action en question n'était pas condamnée d'avance." (raisonnement applicable aussi : au régime Dukan / aux résolutions de nouvelle année / à toute tentative d'éloignement du MacDo)

"On peut juger nécessaire, dans un certain contexte historico-politique, de régler les problèmes à coups de drone guillotine quand on ambitionne d'ébranler l'inébranlable, quand on sait qu'il n'existe aucun autre moyen de contrecarrer le travail d'éternisation du système, d'entamer les structures objectives et subjectives de la domination". (Je rêve d'un monde où Christian Grey se ferait défoncer par un drone guillotine comme seul moyen d'entamer la structure subjective de la domination)


Note finale
2/5
(pas mal)

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