J'ai découvert cette semaine le spectacle Sérénades, qui passe au théâtre Montfort, dans le 15e, avec Anna Mouglagis.
Le topo pourrait être banal, si les genres étaient inversés. Mais, pour une fois, la témérité est féminine, elle a la voix rocailleuse et pas froid aux yeux.
Cette jeune femme, campée par la comédienne, se présente au pied de ce que l'on devine être un immeuble, et attire l'attention d'un homme qui y vit. Elle l'a croisé une semaine plus tôt, elle l'a suivi jusque-là, et ce soir, elle est d'humeur brave, elle se déclare, elle lui demande s'il l'accepte.
Accompagnée d'une guitare électrique, elle chante les mots d'Arnaud Cathrine, tout acquis à sa cause. Puis elle déclame de nouveau, attendant de moins en moins patiemment, et de plus en plus désespérément, un assentiment, un signe, une parole, à défaut d'autre chose.
La sérénade a tôt fait de se muer en monologue, elle va jusqu'à interroger les motifs de ce silence humiliant : si l'homme ne répond pas, est-ce qu'il est avec une autre femme? Est-ce qu'il est mort? A-t-elle passé la nuit à vouloir se donner à un mort?
Elle flirte parfois avec la folie, avec le grotesque, elle veut séduire, elle a tant de questions à la bouche, et peu à peu, elle se soumet, elle s'humilie, elle est une funambule que la moindre brise peut renverser.
La fumée exagérément dense ne suffit pas à masquer sa solitude.
Elle flirte parfois avec la folie, avec le grotesque, elle veut séduire, elle a tant de questions à la bouche, et peu à peu, elle se soumet, elle s'humilie, elle est une funambule que la moindre brise peut renverser.
La fumée exagérément dense ne suffit pas à masquer sa solitude.
Un spectacle qui donne à voir un portrait entier, une envie démesurée, déraisonnable, et les retranchements dans lesquels elle peut conduire.
Et puis, deux jours plus tard, il y a eu Platée. C'était la dernière représentation, au palais Garnier. Aux premières loges (littéralement), j'ai eu la chance de ne rien manquer du spectacle.
Figurez-vous un début déjà pétillant : sur scène, des rangées de sièges justement comme à l'opéra, on croirait au reflet d'un miroir. La gestuelle accentuée des ouvreuses laisse déjà augurer du ton léger de l'adaptation. Et ce n'est rien de dire que ce n'est là que mise en bouche.
Peu à peu, le spectacle révèle son vrai visage, et le metteur en scène, ce qu'il a voulu en faire : des hommes et des femmes coloriés en vert, d'autres intégralement déguisés en grenouilles, avec des masques aux yeux rouges du genre qui font un peu flipper, l'une d'entre elles s'immisce même dans le public, les hommes se griment en femmes pour danser et se faire provocants, les femmes se griment en hommes à leur tour, la Folie (Julie Fuchs, époustouflante) porte une robe faite de partitions et vole la vedette au chef d'orchestre, les chanteurs verseraient pour un peu dans l'opéra bouffe, je vous épargne Cupidon en culotte blanche et chaussettes noires.
Quoique, après réflexion, je ne vous épargne pas.
Beaucoup d'audace et de second degré, c'est à ne pas en croire ses yeux : un véritable feu d'artifices, au sens figuré et quasiment au sens propre.
Je jure que cette image n'est pas un odieux montage.
Ça détonne, c'est décalé, et parfois on ne sait pas trop quoi penser.
Dépaysement garanti!
Et puis, tout de même, cela reste Rameau...
Et puis, tout de même, cela reste Rameau...
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