jeudi 29 octobre 2015

Boussole, Mathias Enard

Je suis fan de Mathias Enard.
Parlez-leur de batailles, de rois et d'éléphants; Rue des voleurs; La perfection du tir...
Sa poésie, son lyrisme élégant me captivent.
Le voir figurer parmi les quatre finalistes du Goncourt a donc été un motif de réjouissance.
La perspective de la lecture de Boussole, plus encore.



Le synopsis

Le narrateur, Franz, se perd en rêveries qui mêlent son amour pour Sarah, leur passion commune pour l'Orient et toutes les formes de l'orientalisme dans l'art notamment, sa solitude, des regrets et des méditations, les souvenirs qui le hantent depuis Vienne jusqu'à Palmyre.


Mon avis

Boussole  se distingue assez des autres romans que j'ai lus de Mathias Enard, et en ce sens, m'a prise par surprise. Le récit est une longue rêverie entrecoupée de digressions, d'anecdotes, et la trame se dilue dans cette ambiance qui naît sous la plume de l'auteur au moyen de références riches et nombreuses, constituant l'Orient en objet de littérature comme d'autres l'ont fait avant lui. Il y a, avant tout, un romantisme exacerbé dans cette oeuvre, une langueur, et l'obsession du narrateur pour son amour perdu, pour la figure insaisissable de Sarah, qui semble toujours lui échapper.
Une oeuvre lyrique et très poétique, qui sublime l'orientalisme en en offrant une analyse et une exploration d'expert.


Pour vous si...
  • Vous êtes envoûté par l'orientalisme en littérature
  • Ou alors par l'opium
  • Vous trouvez qu'on n'utilise pas assez des mots comme "avicenienne"

Morceaux choisis

"Sarah souriait de ma pudeur, elle m'a toujours cru prude, sans doute parce qu'elle ne pouvait percevoir que ce n'était pas la scène en elle-même qui me faisait détourner le regard, mais celle qui se dessinait dans mon esprit, bien plus troublante, en vérité."

"La vie est une symphonie de Mahler, elle ne revient jamais en arrière, ne retombe jamais sur ses pieds. Dans ce sentiment du temps qui est la définition de la mélancolie, la conscience de la finitude, pas de refuge, à part l'opium et l'oubli."

"Pour moi, [Constantinople] était la limite de la musique européenne, la destination la plus orientale de l'infatigable Liszt, qui en avait fabriqué les contours; pour Sarah c'était le début du territoire où s'étaient égarés ses voyageurs, dans un sens comme dans l'autre."

"On peut dire que ma vie spirituelle a été le même désastre que ma vie sentimentale. Je me retrouve aujourd'hui aussi désemparé qu'autrefois, sans la consolation de la foi - je ne fais sans doute pas partie des élus; peut-être manqué-je de la volonté de l'ascète ou de l'imagination créatrice du mystique; peut-être la musique, finalement, était-elle ma seule vraie passion. Le désert s'est révélé (c'est le cas de le dire) un tas de cailloux; les mosquées sont restées pour moi aussi vides que les églises; les vies des saints, des poètes, leurs textes, dont je percevais pourtant la beauté, brillaient tels des prismes sans que la lumière, la lumière avicenienne, l'essence, ne me parvienne jamais."

"Sarah soupirait et riait, elle soupirait et riait et j'avais peur de ce rire, j'en avais peur autant que je le désirais, autant que je voulais l'entendre, comme aujourd'hui dans la nuit de Vienne, alors que je cherche à attraper les souvenirs de Sarah comme un animal les étoiles filantes."


Note finale
4/5
(très bon)

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