jeudi 8 octobre 2015

Faber le destructeur, Tristan Garcia

Je continue mon exploration des productions de Tristan Garcia, et je me demande si je n'ai pas trouvé le Graal.




Le synopsis

Enfants, Basile et Madeleine voient leur existence changer lorsque Faber fait son apparition dans leur petite ville de Mornay. Stigmatisés tous deux, ils découvrent grâce à lui l'amitié et une certaine forme de liberté. Faber est intelligent, mais il est plus que cela : il est stratège, visionnaire, et inquiétant aussi. Au fil des ans, ils réalisent combien il est insaisissable et l'emprise qu'il a sur eux et tous ceux qu'il côtoie, lui dont le passé est absolument mystérieux.
Parvenus à l'âge adulte, ils se confrontent de nouveau à ce personnage qui a marqué leur vie.

Mon avis

Contrairement à ce que j'ai ressenti à la lecture de 7, l'intrigue semble dans Faber parfaitement et précisément maîtrisée. Le style est déjà riche, et les dernières pages, qui offrent une peinture de la période actuelle en tâchant d'en extraire une vision, une interprétation et un sens, m'ont fait pensé à Fitzgerald, à qui je voue pourtant une grande admiration qui ne prête guère à la comparaison à outrance (nuancée toutefois par la fascination que j'éprouve à l'égard de Zelda, et qui rend forcément ambivalente mon goût pour la prose de ce rusé de Francis). En réalité, la chute m'a fait un peu pensé à la Fascination du pire que je viens de lire par ailleurs, avec cette intrusion soudaine de l'auteur dans la fiction, rendant les frontières poreuses et le lecteur presque fou, à questionner la vérité dans tout cela. Faber est un roman perturbant et insidieux, qui laisse présager de quelle puissance est capable Tristan Garcia.   


Pour vous si...
  • Vous vous délectez des phrases dont on a coupé le début, et tous les sujets.
  • Votre première fois a été décevante, et vous aimez qu'on vous réconforte en vous disant qu'il y a pire.
  • Vous avez été traumatisé par un prof au collège, et avez longtemps seriné une vengeance qui n'a naturellement pas trouvé à se matérialiser. Faber est sans doute plus courageux que vous, pour le meilleur et pour le pire.

Morceaux choisis

"Faut que je sourie. C'est quel muscle déjà? Du mal à activer la machinerie, les cordes et les poulies à l'intérieur du corps."

"Il respectait les nombres parce qu'ils n'avaient pas d'histoire, selon lui, et que "l'Histoire, jeunes écervelés, c'est le péché". Les nombres seuls étaient innocents."

"Oh certes, Basile m'avait aimé, mais d'un amour monstrueux. Et maintenant il le mettait en littérature. [...] je sentais pousser sous ma peau le fantôme de celui dont il avait écrit l'histoire, qui était en train de prendre possession de ma personne pour me mettre à la porte de moi-même."

"Nous avons souffert la société comme une promesse deux fois déçue."

"Mon époque n'a rien de mort, simplement tout y est moins fort. Dans ces périodes, pas tout à fait crépusculaires, mais semblables à de longs après-midi d'été où la lumière faiblit, des gens comme Faber apparaissent. Il n'est pas encore temps pour les Prophètes; on se contente de personnages aux nerfs fragiles, insatisfaits, perpétuellement inquiets, fustigeant le confort, la santé, la vie parce qu'ils sentent venir la nuit et la mort, alors qu'elle est encore loin."


Note finale
4/5
(très bon)

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