lundi 19 septembre 2016

Sécessions, Olivier Sebban

La fascination de certains auteurs français pour les Etats-Unis et leur histoire me fascine (ne clignez pas compulsivement des yeux, la redondance est voulue).
Non pas que le sujet manque d'intérêt, bien au contraire, il est d'une richesse immense (comme tous plein d'autres pays aussi, d'ailleurs). Mais, étrangement, cela ne vient pas spontanément à l'esprit de nombreux auteurs d'écrire sur l'Arabie Saoudite, ou sur le Bhutan, à moins que ce ne soit justement le regard étranger porté sur le pays qui apporte une touche singulière. 
Donc, cette particularité m'intéresse. 
C'est pourquoi mon dévolu s'est porté sur le dernier roman d'Olivier Sebban, Sécessions.



Le synopsis

En 1840, Elijah tue son propre frère, et s'enfuit à travers la Géorgie, son père sur ses traces.
Des années plus tard, alors que débute la Guerre de Sécession, Isaac, le neveu d'Elijah, s'engage auprès des Confédérés, et part à la recherche de cet oncle qu'il n'a jamais connu. 

Mon avis

A de nombreux égards, Sécessions m'a fait penser à Un ciel rouge, le matin, de Paul Lynch, à travers la thématique de la fuite. Comme le métayer de Lynch parcourant l'Irlande pour rester en vie, Elijah fuit, son père sur ses pas, et cette chasse à l'homme occupe toute la première partie du roman.

Les péripéties qui sont les siennes se mêlent à son histoire, à ce qui l'a mené à cette première page du livre, foudroyante, où l'on comprend qu'Elijah vient de tuer son frère David.
Ainsi, entre les scènes physiques et violentes se tissent des passages d'introspection, des souvenirs, qui nous éclairent sur ce qui a conduit les deux frères à devenir des rivaux.
L'auteur choisit de placer au centre de son livre un sujet grave et dérangeant, puisque Elijah et David ont partagé l'amour d'une même femme, Ethel, si bien que l'enfant né du foyer formé par David et Ethel est en réalité le fils d'Elijah.

L'histoire familiale se dilue bientôt dans l'histoire du pays, et l'on comprend, durant la deuxième partie du roman, qu'il va s'agir de mettre en présence, et de confronter, Isaac et Elijah.

Le talent de l'auteur réside à la fois dans la peinture de la fresque familiale et historique, et dans son aptitude à ménager la curiosité du lecteur, car ce dernier ne sait jamais véritablement où il est emmené, ce qui confère au récit un certain réalisme : l'aléa est présent, les événements basculent d'un côté ou d'un autre, sans suivre un cours dessiné que l'on s'attendrait à les voir emprunter. La relation nouée entre Isaac et Elijah, en cela, est inédite, elle en serait fascinante, et mène l'intrigue vers une issue dont on n'aurait guère pu présager.

Sécessions est un bon roman, dans la veine des récits familiaux sur fond historique, il se révèle crédible et documenté, mêlant des personnages à la psychologie intéressante de par la singularité de ce qu'ils vivent, et des épisodes capitaux de l'histoire américaine, sans que l'on ne sente le poids de ce regard étranger qui me semble habituellement propre aux auteurs Français. 

Pour vous si...
  • Vous n'êtes pas contre une piqûre de rappel sur la guerre de Sécession

Morceaux choisis

"Le visage de l'enfant était cramoisi et trempé de larmes, ses minuscules poings clos sur sa rage et son exigence."

"Isaac remontait la rue principale de Gettysburg. La faute ou l'errance valaient presque autant que les spectres, l'incessant retour des fantômes de la défaite."

"Leurs rapports distendus, l'aigreur, un désintérêt mâtiné de sournoise amertume grandissaient entre eux. Il ne parvenait plus à la satisfaire et la satisfaire ne l'intéressait plus."


Note finale
2/5
(pas mal)

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