Souvenez-vous, je vous ai parlé de Sophie Daull pour la première fois il y a un an, lorsque j'ai lu son sublime Camille, mon envolée.
L'auteur reste dans le cocon familial, et choisit cette fois de nous raconter sa mère.
On avait laissée Sophie Daull tâchant de vivre sans Camille.
Cette fois, elle bâtit un pont entre sa fille et sa mère, ces deux absentes qui lui ont été enlevées brutalement et trop tôt, et qu'elle porte avec elle chaque jour.
Elle entreprend donc des recherches pour retrouver les traces de sa mère, l'histoire de son enfance dont cette dernière, de son vivant, ne lui a jamais parlé.
L'approche est très intéressante, car elle met en relief les difficultés auxquels on se heurte, dès lors que l'on investigue sa généalogie : lorsque la narratrice décide de partir à la recherche de sa mère, elle réalise qu'elle a manqué l'occasion, quelques années plus tôt, d'interroger Paulette, la sœur de Nicole (la mère), car Paulette est décédée, et ces années durant lesquelles elle ne s'est pas penchée sur le sujet lui ont ôté la possibilité d'en savoir plus quand il était encore temps.
Les coups de téléphone qu'elle passe, les visites qu'elle rend à la mairie du village dont est originaire sa mère s'avèrent rapidement infructueux, sa démarche est même considérée avec une certaine suspicion.
Alors, à partir des maigres éléments dont elle dispose, de bribes de souvenirs, et de son imagination, elle compose la vie de sa mère, son enfance et son adolescence en particulier, sa vie de jeune adulte, ses années Cendrillon auprès d'une sœur aînée peu affectueuse et un poil rancunière.
Dans l'écriture de Sophie perce une immense curiosité, presque impossible à satisfaire, et de la générosité. On se plaît dans sa prose, où la douleur attend aux encoignures, que l'on était tenté d'oublier un instant. La suture est une enquête aux allures de ballade nostalgique, dans laquelle la narratrice recherche désespérément à saisir une figure aimée évanescente.
On lui trouve du charme, du cachet. Le récit est moins bouleversant que celui de Camille, bien sûr.
En ce qui me concerne, je serais ravie de voir Sophie Daull s'éloigner de tout cela, et se risquer à présent complètement à l'art de la fiction ; m'est avis que la tentative serait des plus intéressantes!
"J'avais pris la route vers Coulommiers le coeur battant, la fenêtre ouverte laissant entrer dans la voiture de gros bouillons de printemps éclatant. En ce moment il s'exhibe impudiquement dans toute l'explosion de ses pompons roses et jaunes... Le lilas, la glycine, le colza soûlent les narines. Le coucou, le pissenlit saturent les talus. Cinquante nuances de vert s'étagent sur les collines, du plus tendre au plus profond."
"En un mot, ils tirent le diable par la queue, comme je tire sur l'aiguille, au risque de froncer le tissu, de casser le fil, pour aller au bout de ma suture."
"C'est le temps de l'amour moribond, ce festin de choix pour les poètes et les charognards."
"J'écris ça : "Je suis devenue la mère de ma mère." Dans l'autre livre, celui en bleu pour Camille, j'écrivais : "Je suis devenue l'enfant de ma fille."
Matrices en vrac. Généalogies en toc."
L'auteur reste dans le cocon familial, et choisit cette fois de nous raconter sa mère.
Libres pensées
On avait laissée Sophie Daull tâchant de vivre sans Camille.
Cette fois, elle bâtit un pont entre sa fille et sa mère, ces deux absentes qui lui ont été enlevées brutalement et trop tôt, et qu'elle porte avec elle chaque jour.
Elle entreprend donc des recherches pour retrouver les traces de sa mère, l'histoire de son enfance dont cette dernière, de son vivant, ne lui a jamais parlé.
L'approche est très intéressante, car elle met en relief les difficultés auxquels on se heurte, dès lors que l'on investigue sa généalogie : lorsque la narratrice décide de partir à la recherche de sa mère, elle réalise qu'elle a manqué l'occasion, quelques années plus tôt, d'interroger Paulette, la sœur de Nicole (la mère), car Paulette est décédée, et ces années durant lesquelles elle ne s'est pas penchée sur le sujet lui ont ôté la possibilité d'en savoir plus quand il était encore temps.
Les coups de téléphone qu'elle passe, les visites qu'elle rend à la mairie du village dont est originaire sa mère s'avèrent rapidement infructueux, sa démarche est même considérée avec une certaine suspicion.
Alors, à partir des maigres éléments dont elle dispose, de bribes de souvenirs, et de son imagination, elle compose la vie de sa mère, son enfance et son adolescence en particulier, sa vie de jeune adulte, ses années Cendrillon auprès d'une sœur aînée peu affectueuse et un poil rancunière.
Dans l'écriture de Sophie perce une immense curiosité, presque impossible à satisfaire, et de la générosité. On se plaît dans sa prose, où la douleur attend aux encoignures, que l'on était tenté d'oublier un instant. La suture est une enquête aux allures de ballade nostalgique, dans laquelle la narratrice recherche désespérément à saisir une figure aimée évanescente.
On lui trouve du charme, du cachet. Le récit est moins bouleversant que celui de Camille, bien sûr.
En ce qui me concerne, je serais ravie de voir Sophie Daull s'éloigner de tout cela, et se risquer à présent complètement à l'art de la fiction ; m'est avis que la tentative serait des plus intéressantes!
Pour vous si...
- Vous êtes personnellement tenté par une expérience généalogique, mais ne savez guère comment vous y prendre. Un seul mot d'ordre : ne comptez que sur vous-même.
- La plume découverte dans Camille, mon envolée vous manque.
Morceaux choisis
"J'avais pris la route vers Coulommiers le coeur battant, la fenêtre ouverte laissant entrer dans la voiture de gros bouillons de printemps éclatant. En ce moment il s'exhibe impudiquement dans toute l'explosion de ses pompons roses et jaunes... Le lilas, la glycine, le colza soûlent les narines. Le coucou, le pissenlit saturent les talus. Cinquante nuances de vert s'étagent sur les collines, du plus tendre au plus profond."
"En un mot, ils tirent le diable par la queue, comme je tire sur l'aiguille, au risque de froncer le tissu, de casser le fil, pour aller au bout de ma suture."
"C'est le temps de l'amour moribond, ce festin de choix pour les poètes et les charognards."
"J'écris ça : "Je suis devenue la mère de ma mère." Dans l'autre livre, celui en bleu pour Camille, j'écrivais : "Je suis devenue l'enfant de ma fille."
Matrices en vrac. Généalogies en toc."
Note finale
3/5
(cool)
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