Nombre Premier a acheté 2084 et me l'a prêté.
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Coeur coeur coeur
"Avoir des ennemis est un constat de faiblesse, la victoire est totale ou n'est pas."
"Une date s'était imposée, sans qu'on sache comment ni pourquoi, elle s'était incrustée dans les cerveaux et figurait sur les panneaux commémoratifs plantés près des vestiges : 2084. Avait-elle un lien avec la guerre? Peut-être. Il n'était pas précisé si elle correspondait au début ou à la fin ou à un épisode particulier du conflit."
"Sans témoins pour la raconter, l'Histoire n'existe pas, quelqu'un doit amorcer le récit pour que d'autres le terminent."
"Un musée est un paradoxe, une supercherie, une illusion aussi pernicieuse.
Reconstituer un monde disparu est toujours à la fois une façon de l'idéaliser et une façon de le détruire une deuxième fois puisque nous le sortons de son contexte pour le planter dans un autre et ainsi nous le figeons dans l'immobilité et le silence ou nous lui faisons dire et faire ce qu'il n'a peut-être ni dit ni fait."
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Coeur coeur coeur
Le synopsis
Un pays, l'Abistan, et une date, 2084. Avant cela, nul ne sait ce qu'il y a eu.
A présent, la société est régie par la religion, et son éminent délégué, Abi. Quiconque ne s'incline pas devant sa toute-puissance est puni de la pire façon.
Ati a passé des années dans un sanatorium, parmi d'autres tuberculeux mis en quarantaine.
De retour dans la société, il s'interroge. Et plus il le fait, plus il est assailli de nouvelles questions auxquelles il ne trouve nulle réponse.
Il part en quête de la vérité, pour découvrir ce qui est caché, et comprendre dans quel monde il vit.
A présent, la société est régie par la religion, et son éminent délégué, Abi. Quiconque ne s'incline pas devant sa toute-puissance est puni de la pire façon.
Ati a passé des années dans un sanatorium, parmi d'autres tuberculeux mis en quarantaine.
De retour dans la société, il s'interroge. Et plus il le fait, plus il est assailli de nouvelles questions auxquelles il ne trouve nulle réponse.
Il part en quête de la vérité, pour découvrir ce qui est caché, et comprendre dans quel monde il vit.
Mon avis
2084 est à lire comme un conte philosophique. Son échéance est à la fois suffisamment proche et suffisamment éloignée pour que l'on puisse voir dans l'Abistan un monde foncièrement distinct de celui que nous connaissons, pour autant, la tentation est grande de chercher dans la société actuelle les germes d'une telle possibilité.
Les questionnements d'Ati sont facilement transposables, d'ailleurs, à aujourd'hui, bien que le contexte soit autre, ce qui rend le roman terriblement actuel : qu'est-ce qu'un peuple ? demande-t-il. Quel est le rôle de l'Histoire? Et maintenant, que faire?
Boualem Sansal emprunte à l'imaginaire collectif (les fossoyeurs ne sont pas sans évoquer la figure de la Gloïre dans l'Arrache-coeur) pour dresser le portrait d'une société pernicieuse et paradoxale, d'un ordre qui se veut rassurant en réglant en tout point le quotidien des citoyens mais en leur ôtant toute liberté de penser (d'où l'évident parallèle avec 1984 d'Orwell) ; au nom de Yölah sont commises les pires exactions, et le monde tel qu'on le dépeint en le martelant aux citoyens est clos, il n'existe rien en dehors de l'Abistan, ou du moins est-ce là ce que doivent croire les Abistanais.
On ne peut parler de projection, mais le récit interpelle : on reconnaît dans le fonctionnement de l'Abistan ce qui est à la base de régimes dictatoriaux, la tyrannie trouvant cette fois son ciment dans la religion qui le fonde, de sorte que, si le tableau nous semblerait irréaliste, l'Histoire justement est là pour nous rappeler qu'il y a dans tout cela quelque chose de possible, aussi improbable qu'on souhaite que cela reste.
A cet égard, 2084 est glaçant, et pose la question de la responsabilité individuelle et collective dans l'avènement de la dictature et sa pérennisation.
Les questionnements d'Ati sont facilement transposables, d'ailleurs, à aujourd'hui, bien que le contexte soit autre, ce qui rend le roman terriblement actuel : qu'est-ce qu'un peuple ? demande-t-il. Quel est le rôle de l'Histoire? Et maintenant, que faire?
Boualem Sansal emprunte à l'imaginaire collectif (les fossoyeurs ne sont pas sans évoquer la figure de la Gloïre dans l'Arrache-coeur) pour dresser le portrait d'une société pernicieuse et paradoxale, d'un ordre qui se veut rassurant en réglant en tout point le quotidien des citoyens mais en leur ôtant toute liberté de penser (d'où l'évident parallèle avec 1984 d'Orwell) ; au nom de Yölah sont commises les pires exactions, et le monde tel qu'on le dépeint en le martelant aux citoyens est clos, il n'existe rien en dehors de l'Abistan, ou du moins est-ce là ce que doivent croire les Abistanais.
On ne peut parler de projection, mais le récit interpelle : on reconnaît dans le fonctionnement de l'Abistan ce qui est à la base de régimes dictatoriaux, la tyrannie trouvant cette fois son ciment dans la religion qui le fonde, de sorte que, si le tableau nous semblerait irréaliste, l'Histoire justement est là pour nous rappeler qu'il y a dans tout cela quelque chose de possible, aussi improbable qu'on souhaite que cela reste.
A cet égard, 2084 est glaçant, et pose la question de la responsabilité individuelle et collective dans l'avènement de la dictature et sa pérennisation.
Pour vous si...
- Vous aimez l'anticipation
- La dimension "conte philosophique" ne vous rebute pas : de nombreux passages voient se succéder une description et une réflexion, l'action n'est pas nécessairement au coeur du récit
- Vous savez apprécier l'atmosphère un peu étouffante propre aux dictatures, et la palette édifiante des châtiments corporels qui sont immanquablement mis en place par les régimes despotiques
Morceaux choisis
"Avoir des ennemis est un constat de faiblesse, la victoire est totale ou n'est pas."
"Une date s'était imposée, sans qu'on sache comment ni pourquoi, elle s'était incrustée dans les cerveaux et figurait sur les panneaux commémoratifs plantés près des vestiges : 2084. Avait-elle un lien avec la guerre? Peut-être. Il n'était pas précisé si elle correspondait au début ou à la fin ou à un épisode particulier du conflit."
"Sans témoins pour la raconter, l'Histoire n'existe pas, quelqu'un doit amorcer le récit pour que d'autres le terminent."
"Un musée est un paradoxe, une supercherie, une illusion aussi pernicieuse.
Reconstituer un monde disparu est toujours à la fois une façon de l'idéaliser et une façon de le détruire une deuxième fois puisque nous le sortons de son contexte pour le planter dans un autre et ainsi nous le figeons dans l'immobilité et le silence ou nous lui faisons dire et faire ce qu'il n'a peut-être ni dit ni fait."
Note finale
4/5
(très bon)
4/5
(très bon)
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