samedi 27 février 2016

Le maître de thé, Yasushi Inoué

Par les temps qui courent, les livres qui parlent de thé chaud, sain et simple, sont très à propos.
Et puis, comme j'avais été très marquée par Le vieux fusil, j'ai vu dans Le Maître de thé une opportunité en or de retrouver le plume de Yasushi Inoué.



Le synopsis

Des années après la mort du sage maître Rikyu, qui s'est donné la mort après en avoir reçu l'ordre de la part du gouverneur Hideyoshi, son disciple Honkakubo s'interroge sur les circonstances de cette mort et sur les raisons pour lesquelles son Maître s'est rangé sans contestation à l'ordre qu'il avait reçu. A l'aide d'un journal tenu jadis et de méditations au cours desquelles il s'adonne à des entretiens imaginaires avec son maître disparu, il revisite le passé pour tâcher de comprendre.

Mon avis

Le récit est singulier, dans la mesure où il prend place à une époque éloignée (les années 1600) : le respect de certaines figures comme celle de Maître Rikyu frôle la vénération, et il est étrange de songer qu'il s'agit d'un sentiment cultivé à son endroit par un homme qui l'a côtoyé de son vivant, son propre disciple.

Au-delà de l'investigation originalement menée par ce dernier concernant la mort de Rikyu (les réponses sont à trouver dans ses méditations, ce qui est assez loin des méthodes employées par les cyber-experts de CSI), l'approche est quasiment philosophique, et invite à réfléchir à la mort, à la sagesse, au destin.

Bien entendu, certains passages consacrant la cérémonie du thé sont délectables pour quiconque a le moindre attrait pour le sujet, voire cocasses, lorsqu'on les lit avec un peu de second degré (et d'immaturité, mais ce genre d'élan ne se contrôle pas toujours) : vous pouvez vous référer aux extraits ci-dessus pour vous en convaincre.

La prose traduit admirablement l'état d'adoration de Rikyu et des grands de ce monde dans lequel vit Honkakubo, et présente le fil de ses pensées, car il y a peu d'action en tant que telle dans le récit, le narrateur nous fait voyager à l'époque de Rikyu et nous ramène au temps présent, longtemps après sa disparition. Il s'agit en cela d'un roman relativement contemplatif, très japonais.
Une douce lecture.

Pour vous si...
  • Vous recherchez une lecture délassante, qui invite à la réflexion sans y forcer non plus : faites comme vous voulez, après tout
  • Vous vous demandez à quoi pouvait bien ressembler le Japon du XVIIe siècle

Morceaux choisis

"Monsieur le Gouverneur de Nagato, Shigenari Kimura, qui connut une fin prématurée à Kawachi, durant le siège d'été d'Osaka, était venu me voir dans ma salle de thé, six mois avant sa mort. Il avait déjà prévu de mourir six mois plus tard. Pour lui, c'était sa dernière occasion de partager un thé dans cette vie. Cela, je l'avais bien compris... Comment dire? C'était la cérémonie de sa décision de mourir, l'acceptation de sa propre mort... Et il m'a permis d'assister à ce moment. Là, je me suis dit que voilà ce qu'était le thé."

"Vous avez dégainé votre sabre. C'est pourquoi, en tant qu'homme de thé, je ne peux faire autrement que dégainer le mien."

"Lorsque Messieurs Soki et Oribe reçurent l'ordre de se donner la mort, ils acquirent, pour la première fois, une certitude, la même que mon Maître. Ils découvrirent ce qui est le plus important pour l'homme de thé : préparer sereinement le thé, laisser faire le destin et ne pas tenter d'y échapper."


Note finale
2/5
(pas mal)

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